Santorin… À l’évocation de ce seul nom, toute la mythologie grecque ressurgit, mystérieuse et dramatique. Pourtant, Santorin est aujourd’hui une destination touristique des plus prisées. Rotation de ferries, grappes de touristes, échanges d’amoureux et de nouveaux mariés. Santorin n’est plus qu’un décor d’une vaste séance photo de studio à ciel ouvert. Alors que l’un prend la pose, minaude, se crée un rôle, l’autre dirige, cadre, s’installe derrière son écran. Seul objectif : inscrire sa propre image dans le paysage comme un gage d’appropriation, de récépissé d’une mission accomplie. C’est Narcisse qui se contemple dans un miroir. Un miroir séduisant mais superficiel. Le paysage millénaire est formaté, vidé de son essence propre, aplati comme un vulgaire calque vierge. Jamais il n’est regardé « en face », les yeux dans les yeux.

Ce reportage est une mise en abime de ce spectacle foisonnant. Jouant sur les points de vue, il dénonce avec humour, crée des contrechamps du photographe-photographié, s’invite dans l’histoire racontée. Il s’inscrit tout autant dans la photographie documentaire que dans l’inventaire sociologique, et s’inspire des images de mode par le jeu (spontané) des accessoires, des détails, des attitudes.

Parfois, au milieu de ce tumulte, surgissent d’intenses moments de plénitude. Certains, enfin, se posent et contemplent le paysage. Le photographe capte alors ce silence devant l’immensité.

Reportage réalisé en 2013 et 2014